jeudi 5 janvier 2012

La Vénus de Quinipily à Baud, dans le Morbihan 56.



Pointe de Kerpenhir à Locmariaquer.

L'empire roman a laissé dans sa province de l'Armorique une grande quantité de traces de la présence de sa civilisation. Son ingénierie dans les travaux publics, le développement du droit, son savoir faire artistique, sa philosophie s'étaient répandus sur tout le territoire gaulois et donc armoricain. Quelques restes nous sont parvenus jusqu'aujourd'hui, pas trop nombreux. Les archéologues ont  fouillé de fond en comble les terres et les côtes et ont trouvé des vestiges. Sur les anciennes voies romaines de Bretagne, aujourd'hui fragmentées par la modernisation des routes, quelques colonnes milliaires gravées en latin sont apparues servant à indiquer la distance entre les villes. Elles avaient inscrit dessus le nom de l'empereur qui les avait faites ériger, la distance à la ville, quelques phrases louant l'empereur. Une borne milliaire trouvée à Castennec, dans le Morbihan, appelée Sulim par les romains, était dédiée à l'empereur Vibius Trebonianus du IIIème siècle; aussi, nous avons encore quelques restes de ce que fut un grand aqueduc dans l'importante ville de Ker-Ahès, Carhaix; les vestiges d'un théâtre à Locmariaquer; celles du temple dédié à Mars à Fanum Martis, chez les Coriosolites, aujourd'hui Corseul, et dans cette même ville une dalle funéraire qui repose sur le mur à droite de l'entrée de l'église. Ce ne sont que quelques petits exemples, car les tas de pièces de monnaies, vases et d'autres vestiges fragmentées sont très abondantes. Dans le Morbihan, notamment, ont été trouvées nombreuses statuettes en terre blanche ou rouge, représentant Vénus. Des potiers et des sculpteurs de cette époque fabriquaient selon le goût de ces temps des belles figures de Vénus sortant de l'eau nues, les pieds posés sur un socle, le bras droit en repos, sa main gauche caressant ses cheveux, un drap qui l'enveloppait, le corps gracieusement courbé...




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Castennec, commune de Bieuzy-les-Eaux,
dans le Morbihan.
Les troupes romaines qu'occupaient au fur et à mesure le territoire armoricain, se faisaient franchir un chemin à force de construire les magnifiques routes dallées que nous connaissons encore aujourd'hui; sur les bords de ces chemins y bâtissaient des édifices civiles et militaires pour s'y installer. La route Darioritum (Vannes)-Vorgium (Carhaix), traversait le Blavet à Sullim (Castennec) et les soldats romains construisirent un camp militaire à Castennec, à 11 km au sud de Pontivy, sur un point stratégique du point de vue défensif et de surveillance. Ce camp romain était appelé Sullim et sur cette voie romaine Darioritum-Vorgium existait une station intermédiaire à la pointe de Castennec, dans la commune de Bieuzy. Un oppidum fut bâti sur cette montagne de Castel-Noëc, fermé par un énorme rempart en terre, à la gorge, et défendu par des pentes abruptes.






Ecluse de la Couarde sur le Blavet.
Canal de Nantes-à-Brest.
Morbihan.
M Ledéan, affirme qu'« ici était la station de Suli ou Sulim, mentionnée par la Table théodosienne (et aussi par la carte de Peutinger) et placée sur la voie de Portus Nametum (Nantes) à Gesocribate (Brest), à 20 lieues gauloises de Darioritum (Vannes) et à 23 de Vorgium (Carhaix). La statue (de la Vénus de Quinipily) a été toujours nommée GROECH AR GOARD, ou femme de la garde, ou du camp. Une vieille grosse statue de forme nue, d'environ sept pieds de hauteur, existait depuis un temps immémorial sur la montagne de Castennec, dans un champ dépendant de la métairie de la Couarde ou Goard. Les offrandes des filles se faisaient d'une manière obscène, manière qu'elles s'autorisaient par les « formes indécentes » données originairement à cette statue." On ne peut dire aujourd'hui quelles étaient ces formes qualifiées d'indécentes, personne les a décrites, mais elle furent retaillées par le comte de Lannion par ordre de l'évêque de Vannes Mgr Rosmadec. Les uns ont vu une Vénus Victrix, les autres une déesse arabe ou égyptienne, érigée par des soldats membres en garnison chez les Vénètes ; d'autres, encore, une Isis pleurant la mort d'Osiris, dont le bassin ou cuve qui l'accompagne encore était le tombeau.

Panneau sur le belvédère de Castennec.
 
Ce camp romain était bordé par la rivière du Blavet par le nord, l'est et le sud dans son parcours, formant presqu’île à Castennec, à Bieuzy-les-Eaux. Au IIIème siècle, les Romans bâtirent un établissement d'une certaine importance attesté par des ruines et deux bornes milliaires, une d'elles comme on a vu, en honneur de l'empereur Trébonien. Sur cette voie romaine vers Gesocribate (Brest) qui partait aussi de Condate (Rennes) en passant par Darioritum (Vannes) pour arriver à Sulim (Castennec) et Vorgium (Carhaix), M de Penhouët a trouvé en 1811 une colonne milliaire près de la maison de Guer-Goan (Guer-Goret sur la carte de Cassim) au pied de la montagne du Mané-Guen à Castel-Noëc, Castel désignant « fortification romaine ». A la Couarde, près des ruines de la vieille chapelle de Saint-Michel, des tuiles à rebords et d'autres objets on été trouvés.


Carte du parcours du Blavet
et situation de la presqu'île de la Couarde.

 Tout ce terrain fut autrefois couvert d'habitations et à maintes fois des pièces de monnaie romaines et des statuettes en terre ont été trouvées. Un peu plus loin de l'enceinte, des fragments de briques, des tessons de vases et des restes de ce que furent des habitations romaines. La situation, la forme étrange de la colline, le relief du terrain, la ceinture formée par les eaux du Blavet, tout aboutit à faire de ce point une sorte de citadelle naturelle.
D'après M Penhouët, Castel-Noëc est un endroit remarquable par sa défense naturelle : « il fut jadis une des positions occupés par les romains pour s'y retrancher ». Sur la pierre de cette borne il a copié l'inscription suivante :


Vue de la presqu'île de la Couarde.


IMP. CAES. C. VIBIO - -TREBONIANO. C. XII – P.F. AVGVS
     IMP. C. XIII. T.D.V. MORORUM ANO – III AVG.
     C.V. TREbonianus INO F IMP CAE TDUNG NOP

  « Les cohortes XII et XIII ont dédié le cinquième terme des Maures à l'empereur Caïus Vibius Trebonianus, Victorieux, heureux, et à Volusianus trois fois auguste ».

   Le mot « Mororum » avait une grande importance pour M de Penhouët  car c'est la preuve que des  soldats Maures ou d'origine asiatique formaient partie des troupes romaines en Armorique, notamment à Vannes et à Castennec. Cela justifierai aussi la présence de cette statue de Vénus. Cette colonne est dédiée à l'empereur Caïus Vibius Trebonianus, connu par son surnom Gallus. Il fut proclamé empereur après la mort de Decius, vers les premiers mois de l'an 252. Dix-huit mois après, il fut assassiné par ses soldats en présence d'Emilion, son successeur. On peut dire que c'est une véritable chance d'avoir trouvé un monument dédié à Trébonianus, car rarement il y a des monuments érigés en honneur d'un empereur dont le mandat est aussi court.


Panneau d'information sur le Blavet.

Ce monticule de Castennec a une hauteur de 70 à 80 mètres et le cours du Blavet forme une  presqu'île que les habitants ont nommé en breton "Groech ar goard", ou femme de la garde ou du camp, nom qui a dérivé en français "la Couarde". Une chapelle de Saint-Michel existait auparavant mais elle n'existe plus aujourd'hui. Elle était près d'une maison de fermier qui a conservé le nom de Goard.

Autour de Castennec, ce n'est pas l'eau qui manque, elle qualifie les noms des villes de Saint-Nicolas-des-Eaux et de Bieuzy-les-Eaux... Quelles eaux? Aujourd'hui, la rivière du Blavet est canalisée, mais à cette époque gallo-romaine ces eaux devraient avoir une particularité où les sources et les fontaines abondaient. Camille Julian rapporte qu'« il existe un endroit sous le nom de Sulis qui devait être un sanctuaire de la grande divinité des Celtes et il serait possible que ce sanctuaire ait eu des potiers attachés à lui, fournissant de figurines le public dévot. Tout indique un des plus anciens ateliers de la Gaule, le type de la Vénus, avec ornements inspirés de la symbolique gauloise ; le principal effort fait par ce genre d'artifices pour adapter la plastique de l'argile à la religion indigène ». Ici, nous avons la possibilité de penser que cet endroit était un centre de pèlerinage, un centre d'eaux curatives pour se baigner et à boire où il y aurait lieu un culte où des potiers réputés s'installaient pour vendre leurs statues de la Vénus miraculeuse.



Petite sculpture en bronze d'un évangéliste
sous un Christ crucifié
près du site de Castennec.
 
Il existe un nom de famille attaché à cette cité romaine de Sullim, c'est le nom Sullias. Un potier nommé Rextugenos Sullias, ad Sulliam (de Sullim), pourrait être originaire de ce site de Castennec. Il fabriquait des Vénus, célèbres dans tout le territoire de la Gaule par sa rigidité hiératique. La Vénus de Quinipily n'est guère expressive, ni sort de l'eau en mouvement ni se caresse ses cheveux; le sentiment qu'elle communique est  plutôt statique, de dévotion. Ce prénom Rextugenos est composé de Rext, reizh en breton, qui veut dire « droit » et genus, gen en breton et gens-gentis en latin qui veut dire famille. Rextugenus est donc un enfant de plein droit, légitime et apparemment de lignage noble. Mais à cette époque on trouve d'autres Sullim dans les Gaules. On a trouvé à la Rochelle-Fégréat un potier appelé Rextugenos Syllici (Sullici?) qui a signé une statue de Vénus à la terre de pipe, qualifiée de Vénus gauloise. Sulli était une petite ville qu'aujourd'hui s'appelle Sully-sur-Loire dans le Loiret. Ce qui est claire c'est que Rextugenos est originaire du pays de Sulli ou Sullim. Il est possible aussi que ce Rextugenos qui a utilisé des moules, les a remplis de glaise et a fait des « Vénus à gaine » en terre cuite soit le fils d'un autre potier moins connu habitant le pays de Sullim près du camp romain sur le Blavet.



La Vénus aujourd'hui à Quinipily, près de Baud.
Classée Monument historique depuis le 18 novembre 1943.

La Vénus de Quinipily est-elle originaire d'Asie? On a dit qu'au château de Quinipily, près de Baud, existe une statue..., égyptienne, celte, romaine...? S'agit-il d'Isis pleurant sur le tombeau d'Osiris ? Elle a les bras croisés sur sa poitrine, un signe de douleur chez les Égyptiens. Chez eux, Osiris représentait le dieu Soleil, et Isis, sa sœur et femme, la Lune. Et une chose qui peut nous éclaircir aussi : certains archéologues disent que Bieuzy est l'ancien Bée-Isy, nom composé de Bée qui veut dire tombe, et d'Isy, qui veut dire Isis. Dès la plus haute antiquité, cette idole était adorée par les Bretons qui y tenaient toujours, même après leur conversion au christianisme. A Castennec, les archéologues on trouvé des vestiges d'une population romaine importante, des soldats africains, de la déesse Isis et des bornes milliaires dédiées aux différents empereurs.








 
 
 
 
 
Chapelle de Saint-Gildas aujourd'hui sur le Blavet.

Plus tard, au VIème siècle, Saint-Gildas vint fonder un ermitage sur le bord du Blavet où il y aurait trouvé un temple et une idole ainsi qu'une vaste cuve de pierre, dans laquelle avaient lieu les sacrifices aux dieux romans. Lui et son élève appelé Bieuzy s'installèrent dans une grotte vers 538.

A Castennec, il y avait aussi un établissement accueillant des lépreux qui fut occupé dès 1125 par des moines de Saint-Sauveur-de-Redon. Ils s'y installèrent pour s'occuper, pendant plusieurs siècles, des habitants de cette contrée appelée de la Couarde. Au XIIème siècle, le seigneur de Castel-Noëc, Alain de Rohan, donna cette presqu'île de la Couarde aux religieux de Redon, ils y fondèrent un prieuré et occupèrent la chapelle que Saint-Gildas avait construit sous un rocher et qu'il partageait avec Bieuzy. Les religieux de Redon y restèrent pendant trois siècles. Après leur départ, les édifices tombèrent en ruine et le petit couvent aurait vécu jusqu'à l'époque des invasions normandes, s'effondrant aussi par la suite. En 1732, le prieur de Bieuzy célébrait la messe dans la chapelle que fut démolie après la Révolution.





Le Blavet sur son passage au niveau de la chapelle Saint-Gildas.

Pourquoi un établissement de lépreux ici à Castennec? C'est à cause des eaux curatives sans doute, car à l'époque on ne guérissait de la lèpre que par miracle, les lépreux étant des pestiférés et des marginaux sociaux. Les eaux peuvent guérir si on se lave avec, en se baignant dedans ou en les buvant dans les fontaines. A cet effet, et afin d'accueillir les malades, au Moyen-Âge les fontaines étaient aménagées sur le territoire breton d'un bassin, d'une niche pour abriter le saint et d'une croix.  Les établissements accueillant les lépreux étaient nombreux en Bretagne, car la maladie était assez répandue sur le territoire armoricain. Jusqu'à la pointe du Raz, les établissements pour lépreux étaient sur la voie romaine de Lorhain qui arrrive à Trouguer dans le Finistère. A Cap Sizun, on peut trouver les trois principaux genres de refuges aménagés pour les lépreux : la chapelle de la Madeleine, les Orchlaon ou maladreries et les corderies. Les endroits appelés clandy font allusion aussi aux lépreux, car "clan" en breton veut dire malade et "dy" voir "ty", maison en breton.


COMMANDEZ "LA VENUS DE QUINIPILY" sur edilivre.com paru le 26 mars 2020
 
 
https://www.edilivre.com/la-venus-de-quinipily-29f500ded4.html/ 
 
 

 



Chapelle de Saint-Nicodème à Saint-Nicolas-des-Eaux.

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