Commune de Le Gouray, en Centre Bretagne,
pays des fées Margot.
A Le Gouray, en Centre Bretagne dans les Côtes d'Armor, il y a d'énormes pierres en granit gisant sur le Mont Croquelien. Originaires
de l'ère primaire, entre -600 et -200 millions d'années, le sol
granitique d'aujourd'hui était à cette époque-là à une altitude
de 8.000 mètres. Au cours de millions d'années, cette masse
granitique s'est affaissée et désagrégée. Les forces des agents
météorologiques tels le vent, la pluie, les orages et la foudre ont
frappé le granite et provoqué des effets mécaniques créant des fissures qui les ont peu à peu disloquées. Le résultat final c'est
des rochers formant des chaos aux formes singulières propres à
créer une légende. On dit qu'aux chaos de Croquelien habitent les
fées Margot. Pourquoi les fées Margot ? Dans ces
terres, Margot désignerait les fées habitant cette région.
Sentier dans le bois du Mont Croquelin,
où habitent les fées Margot.
Il y a deux sortes de fées. Les fées des contes sont de demi-déesses; elles jouissaient d'un pouvoir surnaturel par droit de naissance ; les fées des vieux romans de chevalerie ont acquis leur pouvoir à un moindre degré, par l'étude des livres de magie. C'est à cette seconde classe qu'appartiennent entre autres les fées Viviane, Morgane, Margot fées célèbres dans la fabuleuse histoire des chevaliers de la Table-Ronde. Morgane, sœur du roi Artus, fondateur de cet ordre, est en outre représentée comme une fée malfaisante qui harcela surtout la trop tendre Genièvre, épouse de ce prince. Viviane, jalouse protectrice du courageux Lancelot du Lac, a été mieux traitée par les anciens romanciers.
La Bretagne est un pays de fées. Leur demeure se trouve sous les rochers et dans la forêt. La vallée des fées se trouve à Concoret, sur le bord nord de la forêt de Brocéliande à Paimpont, sur les limites du Morbihan et de l'Ille-et-Vilaine. Concoret est un nom d'origine breton, kon-jored, qui veut dire la vallée des fées.
Rocher granitique du Mont Croquelien.
Le royaume des fées Margot est situé dans le plus profond de la terre. Quelques fois, on aurait accès à son chemin à Croquelien, un jour de pleine lune à minuit, au moment de douze coups. Un grand chemin s'ouvrirait vers l'intérieur de la terre. Il faut faire attention car les fées Margot n'aiment pas les humains trop curieux. Cependant, leurs habitations extérieures qu'elles conservent sur le Mont Croquelien nous permettent de satisfaire notre curiosité et d'apprendre un peu plus sur leurs habitudes.
Baignoire des fées Margot.
Là, lorsqu'il fait beau, elles aiment se baigner sur une baignoire en granite, pas à la portée de tout le monde, qu'obéissant à leurs ordres, les énergies magiques du vent et de l'eau ont taillé sur la roche au fur et à mesure. Ce n'est pas étonnant, les fées Margot sont des êtres malins; en plein bain, ce lieu sur le Mont Croquelien jouit d'une magnifique vue sur la Baie de Saint-Brieuc, loin de 30 km.
Le portefeuille des fées Margot. Trois gros rochers
protègent leur fortune des hommes et des femmes avares.

Les fées Margot ne mangent pas de la vache enragée, au contraire, elles sont riches et brassent l'or. Une circonstance qu'elles sont loin de cacher, car ce qu'elles cherchent surtout c'est de faire tomber les humains dans le piège de l'avarice. Leur immense fortune est enterré sous le granit et encadrée par trois gros rochers appelés le Portefeuille de Margot. Ces monstres granitiques bien que figés, sont bien vivants et protègent la fabuleuse fortune des Margot de la convoitise des hommes et des femmes. Comme il arrive aussi sous les menhirs, un grand chaudron d'or est enterré sous le plus gros bloc de granite. Ce n'est pas difficile de deviner lequel. Dans la solitude du lieu, car il n'y a pas de police ni de gendarmes pour surveiller cette fortune, les visiteurs sont très tentés de creuser à crever pour atteindre le précieux trésor. Mais pensez-vous ! On ne peut pas prendre les fées Margot par des petites fées ingénues car elles veillent au grain tout le temps. Cela peut nous coûter chère car leur punition ne consiste pas à écrire cent fois « Ne creuserai plus jamais sous le portefeuille des fées Margot ! » Les larrons seront statufiés en roc pareil que les trois autres veilleurs afin de protéger éternellement ce détestable trésor !
Le fauteuil des fées Margot.
Un jour, une voisine d'un grand courage qui habitait le pays, se trouvant au bout du rouleau, ne put plus donner à manger ses douze enfants. L'audace s'en empara d'elle et se dirigea vers le mont Croquelien pour implorer ces fées malines Margot. Sur ce lieu légendaire, elle fut reçue par une resplendissante fée assise sans aucun souci sur un rocher. Depuis ce jour, le bruit populaire ne cesse de dire que la redoutable déesse Margot aime se reposer sur ce fauteuil de pierre.
Coin du Mont Croquelin, pays de fées Margot.
L'Armorique est par excellence le territoire où les écrivains ont consacré le plus de récits aux protagonistes mythologiques de cette période gauloise fantastique. Sa situation privilégiée au bout du monde a maintenu vivante cette histoire mythique ainsi que la plus vaste variété de ses protagonistes.
Grosse dalle en granit
envahie par la mousse et les lichens.

Parmi
eux, les fées restent des personnages séduisants. Elles sont
ambiguës, belles, lumineuses, puissantes, magiques, vaporeuses... Il
y a une classe de fées très répandue nommée les fées
blanches ; leurs légendes
étaient très connues des Allemands et en Bretagne.
Les habillements blancs sont signe distinctif de pureté, de
bénignité, des dispositions favorables, d'heureux présage. Une
dame blanche, appelée Iona, nymphe de la mer, rendit le courage et
la vie au héros de l'Odyssée, Ulysse. Dans ce récit, une
terrible tempête sur les côtes d'Ionie fut essuyée par Ulysse.
Son esprit fut frappé par l'apparition de cette dame
blanche qui ne se laissa voir
que dans la pénombre d'une caverne. « Des spectres,
qu'on appelle femmes blanches, viennent souvent rendre service aux
hommes pour qui elles ont plus d'affection »,
disait Schot. Ces spectres apparaissaient en femmes toutes blanches,
soit dans les bois, soit dans les prairies où elles aimaient danser
en rond au clair de lune. Ces femmes blanches sont appelées aussi
sybilles et fées ;
elles ont comme reine Haband.
Paysage sur le Mont Croquelien.
Au fond, Le Gouray.
L'historien romain Strabo a connu ces dames blanches appelées druidesses, des femmes en chair et en os réputées par leur connaissances à cette époque.
Il nous en parle dans le Livre VII de sa Géographie. C'était :
« Des vieilles femmes aux pieds nus, aux cheveux blancs, aux
vêtements blancs, retenus par une ceinture garnie d'airain,
accompagnaient, chez les Kimris, toutes les expéditions militaires,
et dressaient au milieu du camp leur appareil de sorcellerie ».
La blancheur de leurs vêtements révélait une mission divine et
sacrée. D'après Pline,
lors des cérémonies, les druides utilisaient une saie et une
tunique blanches. Sulpice-Sévère, dans la vie de Saint Martin, nous
rapporte que les Galles, au IVè siècle, promenaient les images des
démons couvertes d'un voile de lin. Les pythonisses des Kimris
s'habillaient en blanc, à l'opposé des femmes de leur pays,
habillées en noir. Les prêtres des Goths, frères des Kimris,
s'habillaient en blanc, ainsi que les mages de Perse.
La fontaine de Baranton dans la forêt de Brocéliande.
Elle a le pouvoir de déclencher la tempête
si on déverse de l'eau sur le perron.
Les fées sont partout en Bretagne. L'allée couverte de Plerneuf
dans le champ de Kernaut s'appelle « roche aux fées ». A
Saint-Gilles-Pligeaux, près du village de Kertanguy, on voit une
caverne qui, d'après les légendes locales, aurait été habitée
par une sybille. A Plemeur-Bodu, se trouve le château de Kerduel que
la légende place le séjour du roi Arthur et de sa cour splendide ;
elle indique aussi l'île Agathon comme recelant le tombeau de ce
héros d'époques fabuleuses. On trouve la fontaine de Baranton, site légendaire en forêt de Brocéliande demeure des fées, aussi appelée Berenton ou Bellenton, dans les vieilles chartes. Dans la charte de 1467, conservée aux archives de Paimpont, on peut trouver plusieurs articles intéressants concernant la fontaine de Baranton et les propriétés de son perron : il a le pouvoir de déclencher la tempête si on déverse de l'eau dessus.
Château de Trécesson à Campénéac,
forêt de Brocéliande.
La fée Mélusine habitait le célèbre château de Sucinio dans le
Morbihan, le même château où naquit le connétable Arthur de
Richemont. A Locmariaquer, dans le Morbihan, les gens du pays
disaient auparavant que les menhirs étaient les maisons des
korrigans, des courils, petits hommes lascifs qui, le soir, barrent
le chemin nous obligeant à danser avec eux jusqu'à ce que nos
mourions épuisés. Ce sont les fées qui, descendant des montagnes
en filant, ont apporté ces rocs dans leur tablier.