Images de Bretagne: 10/01/2013

Le cargo TK Bremen, échoué sur la plage d'Erdeven, dans le Morbihan.
Tempête Joachim. Décembre 2011.

Cargo TK Bremen. Pavillon maltais.

Le TK Bremen était un bâtiment appartenant à la compagnie turque « ADRIYATIK GEMI ISLETMECILIGI », de 109 mètres de long et pavillon maltais. Il fut construit en Corée du Sud en 1982. Il fit l'objet d'un examen technique en juillet 2011 en Bulgarie et le TK Bremen n'eut aucun motif pour inquiéter les responsables de la navigation maritime.

Port du Dahouët à Pleneuf-Val-André (22).

La région de Bretagne s'étend sur une surface de 27.200 km² et son littoral, extrêmement découpé, a une longueur de 2.700 km, 600 km seulement si le littoral était rectiligne. Elle est baignée par la mer au nord, à l'ouest et au sud. Agricole à l'intérieur, elle a une grande influence maritime, une grande quantité de ses ressources économiques provenant de la mer. Depuis l'antiquité, sur ses côtes se trouvent des ports de pêche, des ports commerciaux et des ports militaires. En plus, au large des côtes bretonnes, se trouve une importante route maritime traversée par des bateaux de toutes sortes qui transportent une grande variété de produits. Lorsque ces produits sont dangereux, il y a toujours un risque de produire des grands dégâts si la météo favorise un accident d'une grande ampleur. Une grande catastrophe arriva en 2000 au moment du passage du pétrolier Erika, qui déversa sa cargaison de pétrole sur les côtes bretonnes dû à un accident. Heureusement, le cargo TK Bremen était vide le moment de cet accident survenu sur le côtes bretonnes près de Lorient en décembre 2011.

Le cargo TK Bremen, sur la plage d'Erdeven vendredi 16 décembre 2011.

Sur le port de Lorient, le cargo aurait voulu prendre cap vers l'Angleterre et attendre dimanche 18 décembre, car après une escale technique, un bateau peut rester 3 jours gratuitement. Mais, le jeudi 15 décembre 2011 à 11h du matin, le TK Bremen quitta le port de Lorient en même temps que le service météo annonçait l'arrivée de la tempête Joachim. Le pilote du port de commerce de Lorient conduisit le cargo par ordre de la capitainerie et du commandant du navire pour qu'il reste à l'abri sur l'Ile de Groix. Le soir même, il s'abritait au port.

Dimanche 18 décembre 2011 sur la plage.

Le 15 décembre, la tempête Joachim, qui a commencé se manifester le 5 et a duré jusqu'au 18 décembre, avance à une vitesse de 20 nœuds, c'est-à-dire, à 37 km/h. A ce rythme, ce phénomène météorologique ne pose aucun problème aux bateaux et le TK Bremen peut quitter le port de Lorient.

La tempête Joachim frappa vendredi 16 décembre vers 1h. Plusieurs facteurs favorisent la dérive du navire: la chaîne de l'ancre n'était pas assez longue, le cargo était vide et léger et il fut poussé para des rafales de 140 km/h. Ces circonstances firent que le bâtiment parte sans contrôle pour échouer à 2h sur la plage d'Erdeven, face à l'Ile de Groix. Le cargo arriva au bord de la ria d'Etel au plus fort de la tempête Joachim et il se posa sur le sable, avec une gîte de 9 degrés.

Équipe de nettoyage dépêchée sur place.

Personne n'avait oublié la grande marée noire causée par la catastrophe du navire Erika en 2000. Tout de suite, des groupes concernés se mobilisèrent afin de réduire l'impact des conséquences de cette catastrophe sur la plage morbihanaise et engager des démarches légales. Un grand problème peut arriver car il y a un risque de marée noire.

Tout de suite, les lieux sont pris par la gendarmerie. Il est impossible d'approcher la coque ocre, car des dizaines de gendarmes veillent au grain, protègent le navire de possibles dangers et bloquent les badauds qui arrivent regarder le géant navire échoué sur la plage. Les pompiers et les volontaires de la sécurité civile sont déjà préparés sur place pour nettoyer les plages : ils doivent dépolluer le sable souillé par le fioul qui s'est échappé du navire.

Le procureur de Brest a ouvert une enquête judiciaire pour trouver la faute. L'association écologiste « Robin des bois », arrive sur place et surveille les travaux. Jean-Yves le Drian, président région Bretagne dépose plainte lundi 19 décembre et les responsables décident que le cargo sera déconstruit sur place.

Les lieux sont encadrés par la police.

Étant donné qu'aucun texte ne permet d'interdire au commandant d'un navire de sortir du port, la ministre de l'environnement, Nathalie Kosciusko-Morizet, se manifeste sur place et annonce l'extension des pouvoirs des capitaineries pour interdire un bateau de sortir en mer à cause de la météo.

Les badauds sont arrivés en masse pour regarder le bateau échoué sur la plage d'Erdeven et des centaines de voitures se trouvent garées sur les routes créant des kilomètres de bouchons; les gens marchent sur les champs et les dunes de Kerminihy en Erdeven, sans savoir que ce lieu est classé Nature 2000. En saison creuse, les hôteliers et restaurants font le plein.

Les dunes sont classées Nature 2000.

Les associations écologistes, les amoureux de la mer et des sports de glisse, les pêcheurs et représentants du secteur maritime se préparent pour expriment leur colère, leur ras-le-bol, leur désolation sur place le samedi 17 et l'après-midi du dimanche 18 décembre. Les organisateurs de cette manifestation ont demandé aux responsables l'autorisation d'une marche pacifique. Ils partirent de la mairie d'Etel avec des banderoles et des slogans sur des cartons vers la plage de Kerminihy encadrés par la présence de 95 gendarmes.

Les mouvements écologiques sont très importants en Bretagne.

Les associations écologistes, les pêcheurs et le secteur touristique éprouvent beaucoup d'émotion et de colère à cause des possibles conséquences néfastes d'un accident de cette ampleur : « Y'en a marre des plages polluées ». Un collectif bénévole s'organise pour surveiller de près le nettoyage du site et la déconstruction du cargo. En plus, étant donné que les dunes font parti du patrimoine naturel de la région et sont protégées, elles ne doivent pas être piétinées par les badauds qui viennent visiter la plage.

Une grande grue sera conduite sur place afin de découper le navire.
Sur l'image, pelleteuse utilisée pour nettoyer les lieux.

Samedi 17 décembre, prêts à dégager les dépôts d'hydrocarbures qui se trouvent un peu partout, sont déjà sur place 120 pompiers équipés d'une combinaison jaune, de gants, de bottes, d'un sceau et d'une pelle. Bien que huit chantiers de dépollution aient été ouverts, on constate que les conséquences sont beaucoup moins graves que prévu. Ce qui s'est déversé n'est que le carburant utilisé pour propulser le bateau.

Les gens furent immédiatement attirés par le cargo échoué sur la plage.

Le dimanche 18 décembre le temps était sec et ensoleillé, une belle journée d'hiver propice à faire une belle promenade et, pourquoi pas, aller faire un tour visiter ce grand navire garé sur la plage. Les badauds ne se soucient pas du froid pour assister à ce spectacle peu fréquent. Ils ont été des milliers à venir se balader près du site dunaire de Kerminihy, classé zone Natura 2000. La société SGS assure la sécurité des lieux et a renforcé ses effectifs avec l'arrivée d'une patrouille équestre. Un vrai besoin à cause du monde qui s'approche du bateau le week-end.

Dimanche 18 décembre 2011: une belle journée ensoleillée.

239 sapeurs pompiers et plus du 100 personnels communaux et départementaux étaient présents pour enlever 245 m cubes de sable pollué. En plus, quatre barrages avaient déjà été installés pour protéger la ria d'Etel et les chantiers ostréicoles d'Etel et de St-Cado. Sur la plage de Kerminihy à 15h de ce dimanche, les gens s'arrêtaient voir le bateau à une centaine de mètres. Ça sentait le fioul. Les espèces qui habitent sont rares et fragiles et piétiner les dunes aura des conséquences bien pires que la pollution engendrée par le cargo. En plus, la fréquentation importante de voitures peut avoir des conséquences irrémédiables sur l'environnement. Cet espace naturel protégé appartient au grand site dunaire de Gâvres, commune de Quiberon.

Une équipe étudie sur place la manière d'attaquer les travaux.

Vers 16h de ce dimanche 18 décembre, 300 manifestants arrivent d'Etel décidés à taguer le bateau, mais les lieux sont protégés par la présence de 150 militaires dont 95 gendarmes mobiles. Des forces opposées se heurtent à Erdeven et c'est la pagaille partout. Des centaines de voitures se trouvent sur la route pour aller à la plage créant des bouchons et d'Auray à Erdeven les voitures roulent au pas. Ça complique l'accès des moyens de secours et des engins de dépollution, car des pompiers sont venus des Côtes d'Armor et de la Sarthe, cirés canaris et visages protégés par des masques.

Pelleteuse utilisée par l'équipe de nettoyage.

Le travail qu'ils doivent faire consiste à arracher à la main ou au râteau des galettes noires et des morceaux de goémon englués sous les yeux des curieux. Une fuite de fioul a été détectée et doit être colmatée et le danger n'est pas encore fini car 230 tonnes de fioul se trouvent encore dans les soutes et le navire contient trois réservoirs. On ne sait pas comment peuvent encore réagir les forces de la nature. La société hollandaise « Smit Salvage » a déplacée des grues jusqu'à la plage pour travailler dans les cales.

Une pelleteuse fut utilisée pour les travaux de nettoyage
et une grande grue pour couper la tôle d'acier du TK Bremen.

La marine nationale a réalisé des travaux de pompage, aidée par l'entreprise hollandaise dépêchée par l'armateur: on pompe à la fois de l'eau et du mazout.

Les ostréiculteurs lavent, calibrent et stockent dans les bourriches destinées à l'expédition les huîtres sorties juste avant l'échouement du cargo. Ce n'est pas par hasard que les ostréiculteurs s'inquiètent, car les fêtes de Noël approchent et 70% de chiffre d'affaire se fait à cette époque à Saint-Cado. Cependant, depuis deux ans, la profession a perdu 30% de ses effectifs à cause d'une hausse de la mortalité des huîtres sur la ria, et aujourd'hui i Ils sont 40 exploitants.

Culture d'huîtres à St-Cado, sur la ria d'Etel.

Dans la ria d'Etel, les ostréiculteurs ont peur et, bien qu'une absence de pollution soit constatée, la partie aval de la ria a été fermée ainsi que la commercialisation des produits stockés en bassins insumersibles. Mais les analyses réalisées vendredi par FREMER confirment l'absence de pollution générale et les 40 ostréiculteurs qui travaillent dans cette zone, se sentant un peu soulagés, peuvent continuer leur activité normalement.

La barre d'Etel:
un important site économique par son intérêt touristique
et ses cultures ostréicoles.

L'expérience de la dernière marée noire occasionnée par l'Erika en 2000 plane toujours sur les têtes des professionnels de la mer sur cette zone. Afin de bénéficier des aides et des protections officielles, ils doivent déposer plainte collectivement et individuellement. Lors de la catastrophe de l'Erika, il n'y avait pas eu de fermeture des parcs ostréicoles. Aujourd'hui, les éleveurs prennent beaucoup plus de précaution pour une situation moins grave. La législation n'a guère évoluée pour protéger le littoral et ceux qui en vivent.

Des associations écologistes se sont déplacées sur place
afin de surveiller les travaux de nettoyage.

Dimanche 18 décembre les gens sont révoltés mais pas résignés. Vers 16h, les manifestants crient leur colère : « A Noël, on voulait de la neige, pas du mazout ». Une grande foule s'est déplacée sur les lieux pour crier sa colère : des élus du pays d'Auray, des associations et des gens du pays. Un appel à la mobilisation via Face-book est une réussite.

Équipe de nettoyage autour du TK Bremen.

L'équipage du TK Bremen était composée de 27 membres de différentes nationalités. Huit d'entre eux sont retenus à Lorient où sont arrivés aussi des avocats, des assureurs et un représentant de l'Etat maltais. 16 Turcs et 3 Azéris de l'équipage sont rentrés dans leurs pays. Ceux qui restent sur territoire français ont été retenus pour les besoins de l'enquête car la région de Bretagne a porté plainte.

Travaux de nettoyage et de déconstruction du TK Bremen.

Une grue géante est utilisée pour le travail de démolition du TK Bremen sur la plage morbihanaise ; pour ce faire, trois à quatre semaines seront nécessaires, selon la météo. Assemblée sur place jeudi 5 et vendredi 6 janvier 2012, une gigantesque grue sur chenilles de 280 tonnes se met en branle. Une pince qui pèse 22 tonnes va déchirer 2200 tonnes de tôle d'acier comme si s'était un sécateur géant.

Pelleteuse utilisée par l'équipe pour les travaux de nettoyage.

Une fois le découpage du cargo en route, les bouts de ferraille sont cisaillés avant de tomber au sol. Ensuite, ils seront taillés en plus petits morceaux sur une plateforme aménagée de l'autre côté de la dune pour être finalement recyclés. Les équipes d'Euro Demolition travailleront 24 heures sur 24. Pour préserver la stabilité du navire, le cargo sera démoli de la proue à la poupe (de l'avant à l'arrière), par petits bouts, de haut en bas. Des difficultés apparaissent: lorsque la mer est basse, les travaux suivent un rythme normal et il n'y a pas de problème, mais quand la mer est haute, il faut tout arrêter.

Cet événement a fait marcher le commerce et les restaurateurs du coin qui ont fait le plein depuis le début de cette affaire : pizzerias, hôtels, restaurants, boulangers...